Une demi-douzaine de principes, dont découlent des dizaines de méthodes et des milliers de produits sont disponibles pour réaliser des mesures de contaminations microbiologiques.
Cette diversité de techniques permet d’adresser celle aussi grande des applications possibles dans l’industrie.
Enfin, chaque produit ou service de contrôle ainsi que les applications auxquels ils sont destinés sont souvent accompagnés de conditions, contraintes et coûts d’utilisation.
Choisir une technique plutôt qu’une autre est par conséquent souvent le résultat d’un compromis complexe.
Compte tenu des conséquences de contaminations indésirables sur les rendements, la qualité et la réputation d’une entreprise, chacun perçoit les enjeux d’une telle décision.
Cet article fait une synthèse des applications, techniques et critères de sélection pour que les professionnels nouveaux dans ce domaine puissent comprendre les options disponibles et faire un choix plus informé.
Applications des analyses microbiennes
Il n’existe pas de solution universelle en matière de test microbien et le choix dépend d’abord de l’application spécifique envisagée, autrement dit de l’information recherchée pour prendre une décision opérationnelle en production.
Conformité des produits / Contrôle du produit fini
Le contrôle du produit final assure qu’il réponde à des spécifications précises et n’est pas « négociable » lorsqu’imposé par la règlementation.
Le résultat engage le plus souvent l’entreprise vis-à-vis de son client et/ou du régulateur et fait appel à des méthodes normalisées mises en œuvre dans un environnement de laboratoire approprié, voire certifié.
Le plan de prélèvement est construit sur les lots produits.
L’objet du test peut viser à informer à la fois de l’identité et de la quantité de microbes.
Par exemple, une entreprise de boissons établit des critères pour le nombre maximum de levures vivantes par bouteille, afin que le produit ne se gâte pas pendant un stockage prolongé ou un transport international par mer. Pour cela, elle recherchera un test ayant la sensibilité appropriée à ses critères d’acceptation et une spécificité suffisante pour compter/discriminer les levures vivantes.
Tests en Cours de Production
Le contrôle du produit à différentes étapes de la production, spécifiées à l’avance, vise au contrôle de sa qualité. La méthode sélectionnée est souvent mise en corrélation avec les techniques utilisées pour le produit final afin de garantir la cohérence des résultats.
Le plan de prélèvement est construit sur les étapes du procédé
L’objet du test peut viser à informer à la fois de l’identité et de la quantité de microbes.
Dans le même exemple ci-dessus, la boisson est testée après une étape finale de filtration ou de pasteurisation et avant la mise en bouteille pour s’assurer que son contenu en levures vivantes est cohérent avec le produit en bouteille répondant à ses critères de libération. Les tests en cours de production peuvent être appliqués à plusieurs étapes du processus pour s’assurer que le nombre de microorganismes préoccupants dans le produit est réduit tout au long du processus.
Surveillance des procédés
La charge microbienne présente dans un produit est maitrisée lorsque le procédé de production est correctement paramétré et stable.
L’indicateur microbiologique le plus pertinent est le plus souvent choisi parmi les plus difficiles à traiter, (« Worst Case ») par le procédé. Le résultat sera mis en relation avec les autres paramètres clés tels que la température, durée de contact, débits etc.
Le plan de prélèvement est construit sur les paramètres de l’équipement ainsi que la charge microbienne à l’entrée et à la sortie de celui-ci.
Le plus souvent nous nous intéressons à la quantité et au type de microbes présents.
Dans le même exemple que ci-dessus, la capacité de l’équipement de pasteurisation ou de filtration à réduire la concentration de levure est vérifiée, le plus souvent en mesurant la teneur en levure avant et après un cycle de pasteurisation avec des paramètres de température/durée réglés au minimum de manière à représenter le scénario le plus défavorable. Si l’équipement réussit le test, cela garantira qu’il remplit efficacement son rôle.
Surveillance de l’hygiène
Si la charge microbienne dans un produit est un paramètre important de production, pour s’assurer que l’équipement lui-même ne contribue pas à l’augmenter, ce dernier sera nettoyé puis désinfecté régulièrement.
Cette application vise à surveiller que les pratiques et matériels déployés pour atteindre et maintenir les exigences sanitaires des équipements sont efficaces. Cet objectif dépend d’un ensemble de contributeurs tels que la nature et conditions d’application de biocides, des procédures et équipement de nettoyage, de la conception et entretien des équipements de production, des interventions humaines et de l’écosystème environnant la production etc. qui varient au cours du temps.
Le plan de prélèvement est construit sur l’état de l’équipement avant et après nettoyage, à un endroit et un moment choisis.
Connaître la quantité de microbes est indispensable mais leur type n’est pas toujours essentiel, en fonction de l’industrie et du processus spécifiques.
En reprenant l’exemple précédent, faire un prélèvement sur les têtes de remplissage de l’embouteilleuse ou à tester l’eau de rinçage de l’équipement de filtration après désinfection permet de vérifier que l’équipement est suffisamment propre pour fonctionner et/ou que les procédures d’hygiène sont efficaces.
Surveillance Environnementale
Les écosystèmes microbiens présents dans l’entreprise varient en fonction des activités et des saisons. Les microbes sont facilement transportés d’un endroit à un autre par contact et les flux de fluides tels que l’air, l’eau, les matières premières et transformées. Ils constituent une variable impactant en premier lieu l’hygiène.
Détecter les contaminants environnementaux sur les surfaces, dans l’air ou l’eau, ou parfois sur le personnel, aide à contrôler les facteurs qui pourraient compromettre les rendements et la qualité du produit et prévenir les risques de contamination.
Le plan de prélèvement est construit sur le plan du site et les flux.
Connaître à la fois la quantité et le type de microbes peut être avantageux car ils permettent de mesurer l’origine et la nature des risques, mais n’est pas toujours essentiel, en fonction de l’industrie et du processus spécifiques.
En reprenant l’exemple précédent, des prélèvements sur les carters de protection, les outils de maintenance, convoyeurs, contenants des déchets, bondes au sol permet de prendre connaissances de foyers microbiens qui risquent potentiellement de se propager aux équipements.
Techniques disponibles pour les tests microbiens
Une fois l’application déterminée, il est temps de considérer les techniques appropriées. Il est impossible de trop insister sur ce point : ce choix impacte la capacité ou non d’un plan de test à recueillir des informations exploitables et à permettre à l’utilisateur de prendre des décisions.
Voici quelques-unes des techniques les plus courantes :
Méthodes par culture
Les techniques basées sur les méthodes de culture consistent à cultiver des micro-organismes à partir d’échantillons sur des milieux contenant des nutriments afin d’identifier et de quantifier différents types de bactéries, de champignons et d’autres microbes.
Cette méthode traditionnelle est la plus utilisée dans les domaines du diagnostic clinique, de la sécurité alimentaire, des essais environnementaux et des produits pharmaceutiques.
Le protocole consiste à inoculer une quantité connue d’échantillon sur un milieu nutritif, sélectif ou différentiel qui permet la croissance des microorganismes, parfois en favorisant la croissance de micro-organismes spécifiques et éliminant ceux sans intérêt. L’incubation à des températures choisies permet aux microbes de se développer en colonies visibles à l’œil nu. Ces colonies sont ensuite dénombrées et peuvent être identifiées grâce à leur morphologie, de couleur et vitesse de croissance. D’autres tests biochimiques, moléculaires ou microscopiques peuvent être effectués pour une identification plus précise.
La méthode MF inclut la Filtration sur Membrane de l’échantillon avant la mise en culture, qui permet de concentrer les micro-organismes et baisse considérablement le seuil de détection de la technique, qui passe de 1 microorganismes formant colonie par ml à 1 par décilitre ou par litre.
Les méthodes basées sur la culture fournissent des informations détaillées sur la communauté microbienne vivante d’un échantillon, y compris par exemple sur leur résistance aux biocides.
Le délai d’obtention des résultats varie traditionnellement de quelques jours à quelques semaines, certains équipements récents permettant une détection en quelques heures, en fonction de la technique exacte et des micro-organismes cultivés, mais les méthodes de culture sont considérées comme l’étalon-or de l’analyse microbienne.
Moléculaire (PCR)
La Réaction en Chaîne par Polymérase (PCR) est une technique moléculaire utilisée pour amplifier et détecter des séquences d’ADN spécifiques, permettant la détection et l’identification de divers microorganismes dans les échantillons. Cette méthode est reconnue surtout pour sa sa spécificité, lui permettant de différencier et d’identifier différents types de microorganismes avec une précision extrême.
Les tests PCR sont utilisés dans le diagnostic médical, la recherche, la surveillance environnementale, ainsi que dans la sécurité alimentaire et le contrôle de qualité.
Le protocole implique l’extraction de l’ADN d’un échantillon, puis l’utilisation de primers et d’enzymes spécifiques pour amplifier des séquences d’ADN cibles au cours de cycles répétés de chauffage et de refroidissement. L’ADN amplifié est ensuite détecté et analysé, souvent par des méthodes basées sur la fluorescence. La capacité de la PCR à détecter même de très petites quantités d’ADN en fait un outil utile pour une identification microbienne précise et une analyse génétique, mais elle nécessite un équipement spécialisé ainsi qu’une connaissance préalable des microorganismes étudiés.
Les cinq techniques de PCR les plus couramment utilisées dans l’industrie sont :
- PCR Basique : Une méthode pour faire de nombreuses copies d’un segment d’ADN spécifique. Elle implique des cycles de chauffage et de refroidissement pour dupliquer l’ADN.
- PCR en Temps Réel (qPCR) : Similaire à la PCR basique, mais elle mesure la quantité d’ADN au fur et à mesure qu’elle augmente pendant le processus. Cela est utile pour quantifier l’ADN.
- PCR de Transcription Inverse (RT-PCR) : Convertit l’ARN (comme celui des virus) en ADN, puis l’amplifie. Cette technique permet de distinguer les cellules mortes des vivantes dans un échantillon et de détecter les virus à ARN.
- PCR Multiplex : Amplifie plusieurs séquences d’ADN en même temps dans une seule réaction. C’est efficace pour analyser plusieurs gènes simultanément.
- PCR Hot Start : Une variation de la PCR basique qui réduit l’amplification non spécifique d’ADN indésirable. Elle utilise une enzyme spéciale qui s’active uniquement à des températures plus élevées.
La LAMP (Loop‐mediated isothermal amplification ou amplification isotherme médiée par boucle) est une méthode moléculaire alternative utilisée pour la détection des pathogènes, qui n’implique pas de cycles thermiques pour amplifier l’ADN. Les équipements mise en oeuvre sont plus petits et moins coûteux.
ATP
Les tests microbiens de l’Adénosine Triphosphate (ATP) détectent l’ATP, une molécule présente dans toutes les cellules vivantes, pour estimer la présence et la quantité de microorganismes dans des échantillons.
Cette méthode est rapide mais n’a pas la capacité à identifier quels microorganismes sont présents ni même à les quantifier avec précision.
Dans des industries telles que l’agro-alimentaire, la santé et les produits pharmaceutiques, les tests ATP sont souvent utilisés pour des évaluations rapides de la propreté et de la charge microbienne.
Le protocole implique la collecte d’un échantillon, souvent de surface, son introduction dans un réactif contenant de la luciférase (la luciférase est une enzyme initialement extraite des lucioles, qui transforme l’ATP en lumière), et la mesure de la lumière émise par la réaction. La quantité de lumière expriée en RL (Relative Light Unit) est corrélée avec les niveaux d’ATP et dans une moindre mesure avec le nombre de microorganismes.
Malgré sa rapidité et sa facilité d’utilisation, les tests ATP servent davantage d’outil d’évaluation préliminaire plutôt que de méthode d’analyse microbienne complète.
Cytométrie en flux
La cytométrie en flux est une méthode utilisée pour analyser les caractéristiques physiques et chimiques de particules dans un fluide.
Le protocole implique la suspension de cellules ou de particules d’un échantillon dans un courant micro-fluidique et leur passage devant un laser. Lorsque chaque particule traverse le faisceau, elle disperse la lumière de façon caractéristique. Ces signaux lumineux sont collectés et analysés pour déterminer diverses propriétés des particules, telles que la taille, la complexité et la présence de marqueurs spécifiques
La cytométrie en flux peut fournir des informations sur le nombre et la composition des populations microbiennes dans un échantillon. Elle permet la différenciation et la quantification de différents types de cellules, y compris la distinction entre les cellules vivantes et mortes.
Cependant, la cytométrie en flux nécessite un équipement très spécialisé, une expertise spécifique et la préparation des échantillons.
Certaines techniques récentes utilisent l’impédance plutôt que la lumière pour détecter les microorganismes lorsqu’ils traversent le flux de fluide.
Méthodes enzymatiques
Ces méthodes impliquent la détection d’enzymes spécifiques produites par certains microorganismes pour détecter leur présence dans des échantillons.
Le protocole commence généralement par la collecte d’un échantillon relativement important, généralement de 100 ml, suivi de l’ajout de substrats qui réagissent avec les enzymes microbiennes.
La présence et l’activité de ces enzymes sont indiquées par des changements mesurables, tels que des changements de couleur ou la libération de signaux fluorescents ou luminescents.
Les tests enzymatiques sont connus pour leur spécificité, car différents microbes produisent des enzymes uniques, et pour leur rapidité.
Ces techniques sont particulièrement simples et efficaces pour détecter des bactéries et des pathogènes spécifiques dans des scénarios de présence/absence du micro-organisme recherché dans l’échantillon.
Cependant, elles peuvent ne pas fournir une vue d’ensemble complète de la communauté microbienne dans un échantillon et sont limitées à la détection de microorganismes qui produisent les enzymes spécifiques testées.
Critères de sélection d’une technique
Après avoir déterminé l’application et revu les techniques disponibles, il s’agit d’établir les critères de sélection, en considérant :
Pertinence par rapport aux microorganismes recherchés
La méthode doit tout d’abord être adaptée aux types de microorganismes pertinents pour l‘application. Il y a peu d’intérêt à une technique enzymatique efficace pour détecter les coliformes si votre processus est plus vulnérable aux levures sauvages, ou si le produit est hostile à la survie des coliformes, par exemple.
Sensibilité et spécificité
La technique devrait pouvoir quantifier la contamination à des niveaux supérieurs et inférieurs au seuil qui pose un risque, et distinguer précisément les microorganismes pertinents de ceux qui ne le sont pas.
Si une technique n’est pas assez sensible pour quantifier un microorganisme de dégradation, un lot de production pourrait être libéré avec des problèmes de qualité en devenir, qui apparaîtront plus tard.
Méthode d’échantillonnage et représentativité
Choisir la bonne méthode d’échantillonnage, le moment et l’emplacement du prélèvement conditionne le fait que l’échantillon analysé est bien représentatif du lot ou l’équipement à contrôler.
Par exemple, tester l’eau de rinçage NEP/CIP d’une cuve donnera une indication de la propreté de toute la surface intérieure de la cuve, tandis que le prélèvement de surface sur le plafond de la même cuve donnera une indication précise de la propreté de la surface la plus difficile à nettoyer.
Conformité réglementaire et validation
Lorsqu’applicable, la méthode doit se conformer aux contraintes réglementaires et être validée le cas échéant pour chaque application.
Il convient de noter que dans la plupart des cas, les réglementations ne spécifient à la fois les méthodes et les critères d’acceptation (obligation de moyens et de résultats), que pour les produits finis et sur les critères microbiens représentant un danger pour le consommateur.
Cela est à distinguer des programmes d’auto-contrôle imposés par la réglementation, dans lesquels le fabricant a l’obligation de disposer d’un plan de surveillance microbienne approprié, sans que la méthode de test ou les critères d’acceptation pour ces auto-contrôles ne soient imposés.
Le fabricant est considéré comme la partie la plus compétente dans la conception et la mise en œuvre d’un tel plan.
Vitesse de Détection (Temps jusqu’au Résultat)
Bien que des résultats rapides soient souhaitables, ils ne doivent jamais être obtenus au dépend de la précision et la fiabilité des résultats nécessaires pour l’application choisie. Des résultats rapides qui ne répondent pas à ces exigences peuvent mener à une méconnaissance des risques. En fait, la vitesse de détection ne doit être considérée qu’après les autres critères.
Lorsque les critères incontournables sont satisfaits, la rapidité du temps de résultat peut présenter un réel intérêt pour libérer plus rapidement un produit intermédiaire ou final, ce qui améliore le cash-flow.
Intégration des contrôles dans les activités opérationnelles
En plus de ces considérations, le coût de la technique, la facilité d’utilisation, le temps de manipulation, l’intégration dans le planning de travail normal, les investissements nécessaires en équipement, documentation et formation sont également des facteurs importants.
Conclusion
Sélectionner une méthode de contrôle microbiologique est une décision qui doit être prise avec une compréhension des objectifs et contraintes spécifiques. Ce choix doit être dicté par des critères qui englobent la capacité à identifier et quantifier précisément les microorganismes, la conformité avec les réglementations et la validation de l’efficacité de la méthode dans le cadre prévu.
La complexité de cette décision est en partie due aux contraintes de sensibilité et spécificité pour détecter des niveaux potentiellement dommageables ou inacceptables de contamination.
De plus, le protocole d’échantillonnage doit être suffisamment robuste pour fournir un véritable reflet de l’équipement ou du produit à contrôler.
La vitesse de détection est un facteur d’autant plus critique que les flux sont tendus, mais elle ne peut pas supplanter la précision et la fiabilité des résultats.
En fin de compte, le choix d’une technique, d’un protocole et d’un plan de prélèvement forment un ensemble qui est le résultat de considérations liées à l’application, aux moyens et aux enjeux de l’entreprise.
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Les dispositifs de test autonomes nomad offrent un excellent compromis entre sensibilité, spécificité, vitesse de détection, simplicité d’utilisation et coût pour les applications de contrôle des procédés, de l’hygiène et de l’environnement, mais ne sont pas adaptés à tous les cas.
Il est essentiel de choisir la technique qui convient le mieux à votre situation.
Si vous avez des questions sur la technique d’analyse la mieux adaptée à vos besoins, n’hésitez pas à nous contacter